Université de Liège. Cours de questions approfondies du Szondi
PART 1. Jean Mélon, Professeur
Le problème structural de la Schicksalsanalyse.
A la différence des autres tests projectifs, le test de Szondi contient sa propre théorie; elle lui est intrinsèque.
La découverte majeurefn 1
de SZONDI réside dans son schéma pulsionnel (Triebschema) puisque ce schéma a présidé aussi bien à la construction et à la mise en forme du test qu'aux élaborations théoriques des données empiriques issues de l'expérimentation testologique.
Construit sur la base des grandes entités cliniques de la psychiatrie classique, le système pulsionnel (Triebsystem ) opère, selon le mot de SCHOTTE, "le passage des classes aux catégories"fn 2.
Les classes sont celles d'un regroupement nosographique original produit au croisement des oeuvres de KRAEPELIN et BLEULER, pour ce qui est de la mise en ordre du champ psychiatrique à travers l'opposition entre les cyclophrénies (C) et les schizophrénies (Sch), et de FREUD pour ce qui concerne le rapprochement entre les perversions sexuelles (S) et les névroses définies comme "négatif de la perversion", dont le paradigme est l'hystérie redéfinie comme affection paroxysmale (P).
Quant aux catégories, ce sont celles de l'existence humaine ressaisie dans une perspective anthropopsychiatrique qui, conformément au principe du cristalfn 3
, veut voir dans les formes pathologiques de cette existence, la "voie royale" qui mène à la compréhension du fonctionnement psychologique normal, l'homme étant considéré comme un être en devenir (point de vue ontogénétique) dont le développement est soumis à un ensemble de lois (point de vue structural) invariables et universelles.
SZONDI se rallie explicitement à l'opinion fondamentale de FREUD lorsque celui-ci affirme notamment:
"Nous savons depuis longtemps que nous devons nous attendre à rencontrer les mêmes complexes et les mêmes conflits chez les malades et chez les gens sains et normaux. Nous nous sommes même habitués à supposer chez tout homme civilisé une certaine dose de refoulement des motions perverses, d'érotisme anal, homosexualité et autres, ainsi qu'une part de complexe paternel et maternel, et d'autres complexes encore, tout comme dans l'analyse élémentaire d'un corps organique nous pouvons déceler en toute certitude les éléments: carbone, oxygène, hydrogène, azote et un peu de soufre. Ce qui distingue les uns des autres les corps organiques, c'est la proportion quantitative de ces éléments et la constitution des liaisons qu'ils établissent entre eux. Ce dont il s'agit chez les normaux et les névrosés, ce n'est donc pas l'existence de ces complexes et conflits, mais la question de savoir si ceux-ci sont devenus pathogènes, et en ce cas quels mécanismes ils ont alors mis en oeuvre". fn 4
L'ambition première de SZONDI a toujours été de fonder la psychopathologie comme science, avec ses objets et ses lois propres, d'en faire une science "auto-logique", comme toutes les autres sciences fondamentales, pour n'avoir pas besoin d'importer ses concepts d'autres domaines du savoir et de fonctionner toujours de manière bâtarde, ana-logique.
A cette fin, SZONDI tente de faire la part de l'essentiel et de l'accessoire dans la nosographie psychiatrique de son époque.
Il aboutit à redisposer les choses dans un certain ordre, et ce, à partir du concept de pulsion qu'il emprunte évidemment à FREUD.
Son acte décisif, auquel FREUD s'était refusé, et que personne d'autre n'a jamais accompli, aura été de dénombrer les pulsions, de les agencer entre elles au sein d'un système, de clôturer l'ensemble et d'affirmer que cet ensemble faisait structure, que c'est la structure-même du fonctionnement de l'être humain en tant que l'homme est animé, non par des instincts immuables, comme l'animal, mais par un jeu de pulsions dont le destin est imprévisible, ce qui fait que l'homme ne reçoit pas seulement sa détermination de la nature, mais des lois qui président à son destin, des lois, faut-il le dire, qui sont d'une complexité extrême dans la mesure où, comme disait NIETZSCHE, l'homme est l'animal qui n'est pas encore fixé" (dasnoch nicht festgestellte Tier), dans le sens d'une espèce pas encore ni jamais bien définie, pas encore ni jamais bien déterminée.
C'est la clôture de l'énumération des facteurs et vecteurs pulsionnels, et leur présentation dans le tableau de protocole du test qui confère au schéma pulsionnel son caractère de structure. Désormais, chaque facteur, chaque vecteur, chaque constituant du tableau se définit par rapport aux autres:
"Plus rien n'a d'existence autonome, tout est reconstitué en et par des réseaux de relations significatives : nous venons de quitter le régime dans lequel les maladies mentales sont considérées "partes extra partes", pour l'articulation d'une structure unique dont l'ensemble les recoupe et non plus les regroupe". fn 5De par la mise en tableau, chaque constituant reçoit, outre sa signification propre, une valeur de position dans l'ensemble. fn 6
C'est ce qui conduit à parler de "positions pulsionnelles", au sens kleinien du terme, plutôt que de tendance ou de réaction pulsionnelles comme le faisait SZONDI.
Pour SZONDI, les maladies psychiques ou mentales ne sont pas des maladies du cerveau (Hirnkrankheiten ) ou de l'esprit (Geisteskrankheiten ) mais des maladies pulsionnelles (Triebkrankheiten).
Quand il produit son système des pulsions, SZONDI en distingue quatre, qu'il juge fondamentales.
Ce sont:
la pulsion du Contact (C)
la pulsion Sexuelle (S)
la pulsion des affects, appelée Paroxysmale (P)
la pulsion du moi (Sch), Sch correspondant ici aux trois premières lettres de schizophrénie.
Les pulsions, FREUD l'avait déjà dit, ne sont pas identifiables en elles-mêmes.
On ne peut les reconnaître qu'à travers leurs représentants (Repräsentanten ) et, au mieux, quand ceux-ci se livrent , au plan des affects (Affekte) et des représentations (Vorstellungen ) de chose (Sache ) et de mots (Worte ), à des manifestations extrêmes, qui font que l'une et/ou l'autre des pulsions se dissocient d'une totalité où elles étaient censées faire bon ménage avec les autres.
C'est la démesure d'une - ou d'un concert de - revendication pulsionnelle qui déséquilibre la structure globale et, en la/les faisant saillir exagérément, la/les fait se révéler dans sa/leur singularité. Par exemple, le besoin de se venger (e -) ou , à l'inverse, de réparer (e + ), de se racheter par ses mérites, ces besoins peuvent être si forts qu'ils orientent toute la destinée d'un sujet, faisant parfois la grandeur de cette destinée, mais parfois aussi sa misère, le rendant malade ou fou, infernal pour lui-même et pour les autres.
Si nous envisageons les quatre grandes pulsions ou les quatre vecteurs pulsionnels (comme SZONDI les appelle), nous pouvons dire que:
Les troubles du Contact sont les troubles de l'humeur, que nous appelons thymopsychopathies, représentées à l'extrême par la manie et la dépression;
m et d , initiales de manie et dépression , deviennent les deux facteurs constitutifs du vecteur du Contact; les troubles du contact sont les troubles de l'humeur qui sont des troubles de notre relation fondamentale au monde environnant, troubles de l'accordement (au sens musical du terme , Stimmung ) au rythme de la vie, troubles du rapport à l'ambiance; la mauvaise humeur, pour dire les choses simplement, est une humeur désaccordée.
Les troubles Sexuels sont les perversions;
le déséquilibre pervers se produit quand toute la vie est dominée par le désir de posséder pleinement l'objet sexuel, lorsque la jouissance au sens quasi notarial du terme, devient le seul but ou le but suprême; les représentants prototypiques de la perversion sont l'homosexuel et le sadique.
Les troubles Paroxysmaux sont les troubles névrotiques.
La définition que Szondi se donne de la névrose n'est pas la définition commune. Pour Szondi, les troubles névrotiques, au sens strict, sont ceux qui interviennent dans la vie des affects et qui se manifestent bruyamment par des crises, par des paroxysmes, d'où dérive le concept de paroxysmalité;
mais qu'est-ce qui produit les affects?
C'est, dit Szondi, non pas la relation à l'objet ou à l'ambiance mais la rencontre toujours surprenante et immanquablement conflictuelle avec le principe de la Loi et des deux grands interdits fondamentaux que sont l'interdit du meurtre du père et l'interdit de l'inceste; autrement dit l'Oedipe;
les représentants prototypiques de la névrose, définie comme état de crise plus ou moins permanent sont, pour Szondi, non pas l'obsessionnel et l'hystérique, comme c'est le cas chez FREUD, mais l'épileptique et l'hystérique, c'est-à-dire ceux qui réagissent violemment à la crise (oedipienne) en faisant précisément des "crises".
Enfin, les troubles du moi sont ceux qui concernent l'ontogenèse du moi, son "auto-ob-tention" (Selbst-er-haltung )fn 7 comme son autoconservation (Selbsterhaltung) et, négativement, la destruction du rapport du sujet à soi-même , qui conduit aux formes extrêmes des troubles de l'identité rencontrés dans la psychose et plus particulièrement la Schizophrénie dont les figures prototypiques sont celles du katatonique et du paranoïaque.
Le point de vue structural et la référence aux fantasmes originaires.
SZONDI n'a jamais douté que son schéma pulsionnel avec ses huit facteurs regroupés en quatre vecteurs constituât un système ou une structurefn 8
Léopold Szondi (1947). Diagnostic expérimental des Le mérite revient à Jacques Schotte d'avoir produit la définition purement étymologique de ce que FREUD nommait de manière équivalente "pulsions du moi' ( Ich triebe ) et "pulsions d'autoconservation" ( Selbsterhaltungstriebe ) quand il les a opposées, dans sa première théorie du dualisme pulsionnel, aux "pulsions sexuelles". Etymologiquement, "( sich ) Selbst- erhalten" signifie": "s'ob-tenir soi-même", ce qui permet , par la médiation d'un seul et même signifiant de réunir ce qui a toujours fait problème dans la théorie psychanalytique du moi, à savoir l'articulation
Léopold Szondi (1947). Diagnostic expérimental pulsions. Paris, PUF, 1952, p.1.
, c'est-à-dire une totalité qui fût quelque chose de plus que la somme de ses éléments constitutifs, lesquels éléments, à l'instar des phonèmes de la langue, des notes de la gamme musicale ou des atomes de la chimie, ne se définissent et ne reçoivent leur détermination qu'à travers les rapports qu'ils entretiennent avec tous les autres éléments du système. C'est dans et par ce rapport que leur spécificité reçoit sa détermination, qui pour être générique n'en est pas moins aléatoire.
Mais SZONDI ne s'est jamais vraiment préoccupé de justifier la qualité structurale qu'il attribuait à son schéma pas plus qu'il n'a jugé nécessaire de légitimer l'emprunt qu'il a fait à FREUD du concept de pulsion. SZONDI avait les qualités et les défauts des génies intuitionnistes: c'était ainsi, un point c'est tout. Quand on lui demandait pourquoi quatre vecteurs et huit facteurs pulsionnels, il répondait invariablement:" Apportez m'en un autre et on verra!". A ce jeu, il gagnait à tous les coups. Le temps que le questionneur ait récupéré l'usage de ses cordes vocales, SZONDI était passé à un autre sujet, le plus souvent lesté d'un irrésistible humour juif, ce qui vous décourageait complètement de revenir sur ces questions épistémologiques manifestement oiseuses à ses yeux.
C'est là le grand point faible de son entreprise théorique. Parce qu'elle n'est pas épistémologiquement fondée, sa systématisation apparaît gratuite sinon absolument fantaisiste. Si on y ajoute le caractère encore plus fantaisiste de la théorie "génotropique", on n'a pas de peine à comprendre le peu de succès que SZONDI a remporté dans le monde scientifique, alors que lui-même n'avait pas d'autre idéal que celui du savant. fn 9
On sait bien par ailleurs que FREUD s'est toujours défendu de définir trop précisément le concept de pulsion - dont il se plaisait à invoquer la " grandiose indétermination" -, qu'il a refusé d'en faire le comptefn 10
"Tout compte fait,je doute qu'il soit possible un jour,en se fondant sur l'élaboration du matériel psychologique,de recueillir des indices décisifs pour séparer et classer les pulsions".
et qu'il a également repoussé toutes les tentatives de systématisation, a priori suspectes de "philosophisme", se contentant des dualismes percutants mais sommaires qui opposent pulsions du moi et pulsions sexuelles, libido d'objet et libido du moi, pulsions de vie et pulsions de mort.
Nous pensons fn 11 avoir pointé ce qui fait structure chez SZONDI, comme chez FREUD d'ailleurs, en établissant l'homologie de fait entre les vecteurs szondiens et les fantasmes originaires freudiens.
C'est dans la discussion finale du cas de l'Homme aux Loups fn 12 que FREUD a défini le plus précisément ce qu'il entendait par fantasmes originaires (Urphantasien), ici assimilés à des "schémas phylogénétiques" innés, aux "catégories" - au sens kantien du terme - de la pensée primaire (inconsciente) et à l'instinct animal, ce qui montre bien, si c'était encore à démontrer, que ce qui chez FREUD fait office d'équivalent de l'instinct animal, ce n'est certainement pas la pulsion mais bien, c'est évident dans le texte qui suit, les fantasmes originaires en tant que "prescience" ("Vorbereitung zum Verständnis", littéralement : "préparation pour l'entendement"):
"J'ai achevé de dire ce que je voulais rapporter de ce cas morbide. Deux des nombreux problèmes qu'il soulève me semblent mériter encore une mention spéciale. Le premier est relatif aux schémas phylogénétiques que l'enfant apporte en naissant (les fantasmes originaires), schémas qui, semblables à des "catégories" philosophiques, ont pour rôle de "classer" les impressions qu'apporte ensuite la vie (Schemata, die wie philosophische "Kategorien" die Unterbringung der Lebenseindrücke besorgen). . . . Le complexe d'Oedipe, qui embrasse les rapports de l'enfant à ses parents, est l'un d'eux;il en est, de fait, l'exemple le mieux connu;fn 13
. . . . Le second problème n'est pas très éloigné du premier, tout en étant incomparablement plus important . Si l'on considère le comportement de l'enfant de 4 ans en face de la scène primitive réactivée ( le rêve des loups comme moment d'émergence du fantasme de castration et de l'angoisse qui produit la phobie hystérique du petit Serge), si même l'on pense aux réactions bien plus simples (la défécation comme révélateur de l'excitation anale) de l'enfant de 1 an 1/2 lorsqu'il vécut cette scène , on ne peut qu'avec peine écarter l'idée qu'une sorte de savoir difficile à définir, quelque chose comme une prescience agit dans ces cas chez l'enfant. Nous ne pouvons absolument pas nous figurer en quoi peut consister un tel "savoir" (Wissen), nous ne disposons à cet effet que d'une seule mais excellente analogie: le savoir instinctif - si étendu - des animaux.
Si l'homme possède lui aussi un patrimoine instinctif de cet ordre, il n'y a pas lieu de s'étonner que ce patrimoine se rapporte tout particulièrement aux processus de la vie sexuelle, bien que ne devant nullement se borner à eux. Ce patrimoine inconscient constituerait le noyau de l'inconscient (Kern des Unbewussten), une sorte d'activité mentale primitive (eine primitive Geistestätigkeit), destinée à être plus tard détrônée et recouverte par la raison humaine (Menschenvernunft) quand la raison aura été acquise. Mais souvent peut-être chez nous tous, ce patrimoine instinctif garde le pouvoir de tirer à soi des processus psychiques plus élevés. Le refoulement serait le retour à ce stade instinctif, et c'est ainsi que l'homme paierait, avec son aptitude à la névrose, sa grande acquisition nouvelle;il témoignerait de plus, du fait que les névroses sont possibles, de l'existence de stades antérieurs instinctifs. Et le rôle important des traumatismes de la petite enfance serait de fournir à l'inconscient un matériel qui le préserverait de l'usure lors de l'évolution ultérieure".
Les fantasmes originaires en tant que "noyau de l'inconscient" (Kern des Unbewussten ) et inducteurs d'une précompréhension - à quoi correspondent les théories sexuelles infantiles - de ce qui advient au petit d'homme défini comme sujet des/aux pulsions, sont les organisateurs du désir humain en tant que ce désir plonge précisément ses racines dans le(s) fantasme(s).
Comme LAPLANCHE et PONTALISfn 14 l'ont remarquablement montré, les fantasmes originaires sont chargés de rendre compte de l'origine et du surgissement des éléments premiers constitutifs du désir proprement humain en même temps qu'ils lui offrent un moule et lui donnent une forme à travers une mise en scène où les positions de sujet et d'objet ne sont pas données d'avance.
Les dernières lignes de leur article posent la question du pourquoi et du comment:
"Mais le fantasme n'est pas l'objet du désir, il est scène. Dans le fantasme en effet, le sujet ne vise pas l'objet ou son signe, il figure lui-même pris dans la séquence d'images. Il ne se représente pas l'objet désiré mais il est représenté participant à la scène, sans que, dans les formes les plus proches du fantasme originaire, une place puisse lui être assignée (d'où le danger, dans la cure analytique, des interprétations qui y prétendent). Conséquences: tout en étant toujours dans le fantasme, le sujet peut y être sous une forme désubjectivée, c'est-à-dire dans la syntaxe même de la séquence en question. D'autre part, dans la mesure où le désir n'est pas pur surgissement de la pulsion, mais est articulé dans la phrase du fantasme, celui-ci est le lieu d'élection des opérations défensives les plus primitives telles que le retournement contre soi, le renversement dans le contraire, la projection, la dénégation;ces défenses sont même indissolublement liées à la fonction première du fantasme - la mise en scène du désir - s'il est vrai que le désir lui-même se constitue comme interdit, que le conflit est conflit originaire.
Quant à savoir qui signe la mise en scène, pour en décider, le psychanalyste ne devrait plus se fier aux seules ressources de sa science ni même à celles du mythe. Il faudrait encore qu'il se fasse philosophe. "
Si on se réfère à la trilogie lacanienne du Symbolique, de l'Imaginaire et du Réel, on peut dire que le réel, impossible à connaître comme tel, c'est la pulsion, que l'imaginaire est constitué par la série des fantasmes idiosyncrasiques du sujet , "pensées de liaison et de transition"fn 15
, et que le symbolique est l'ensemble, la structure, des lois qui président au fonctionnement de la réalité psychique dont les fantasmes originaires, en tant que schèmes organisateurs du désir, constituent en quelque sorte la matrice.
Il est assez facile de voir que ce qui est en question dans le vecteur sexuel de Szondi, c'est la question du rapport au corps comme objet de séduction et de jouissance,
que le vecteur paroxysmal confronte le sujet à la Loi, aux interdits majeurs de l'inceste et du parricide, la scène primitive figurant le lieu de rencontre impossible entre deux sexualités incompatibles, la sexualité infantile et la sexualité adultefn 16,
et que le vecteur du moi, posant la question de l'identification différenciatrice, entre être et avoir, renvoie à la question décisive de la différence des sexes à travers le fantasme et la théorie de la castration.
Quant au vecteur du Contact, il est mis en rapport avec le fantasme originaire de régression dans le ventre de la mère, que Freud a toujours hésité à insérer dans la série des fantasmes originaires parce qu'il y voyait une sorte de transposition mythique idéalisée du fantasme de la scène primitive.
Ce qu'il écrit dans le commentaire du cas de l'Homme aux Loups à propos du symptôme du "voile"fn 17 permet d'en appréhender la fonction essentielle qui est de capter les désirs opposés-complémentaires de a) retrouver la félicité mythique du paradis maternel où vie et mort se confondent ( C - +) et b) de renaître (C + - ) en brisant le cocon, en "se jetant dehors" ou en "sautant bas".
La mise en rapport des vecteurs szondiens et des fantasmes originaires permet de les considérer, d'un point de vue topique, comme les lieux ou les scènes d'une problématique, d'un traumatisme ou d'un complexefn 18, d'une angoisse, du primat d'un déterminant pulsionnelfn 19, d'un désirfn 20 et d'un destin pulsionnelsfn 21 dotés chacun d'une relative spécificité:
On voit par là comment le schéma szondien permet de rassembler de manière cohérente, et de mettre en forme, une série de concepts dont l'homogénéité est ainsi soulignée mais qui, chez FREUD et d'autres, se présentent le plus souvent à l'état de "disjecta membra", par exemple la série des fantasmes originaires, les modes de l'angoisse, les destinées pulsionnelles etc. . . A chacun des vecteurs szondiens correspond un champ particulier du fonctionnement psychique avec sa problématique propre, notamment en ce qui concerne le rapport au corps, la relation sujet-objet, la position grammaticale de la personne, un certain type de visée agressive etc. . . Le passage d'un champ à l'autre se réalise au travers d'une filière où doit s'élaborer à chaque fois un type bien défini de conflit dialectique. Le tableau suivant en donne une représentation schématique. fn 22
6. 1. 3. Le point de vue ontogénétique et la théorie des circuits pulsionnels.
En 1975, Jacques SCHOTTEfn 23 a proposé de généraliser aux quatre vecteurs du schéma la notion de circuit pulsionnel (Triebesumlaufsbahn) que SZONDI avait introduitefn 24 pour le seul vecteur Sch.
Cette notion de circuit, chez SZONDI lui-même, renvoie à deux idées: d'une part que la normalité ou la santé mentale est liée à une certaine mobilité de la vie pulsionnelle par opposition à la pétrification dans certains clivages ou dans certaines structures rigides qui caractérisent le pathologique. D'autre part, la notion de circuit évoque l'idée d'un ordre de complexité croissante entre les différentes fonctions du moi.
Le circuit proposé par SZONDI est le suivant:
3) k + 2) p +
4) k - 1) p -
--------------------------------------------------------------------------------
ça, ICS
Ce circuit en forme de point d'interrogation pose un problème.
Selon SZONDI il est actualisé par le déroulement habituel d'un traitement analytique ou psychothérapeutique où on suppose que "tout contenu psychique est successivement traité dans la vie du moi selon l'ordre hiérarchique des fonctions dites de défense". . . Le contenu apparaîtrait d'abord sous forme projective (p - ) comme s'il venait de l'extérieur, puis il ferait l'objet d'une prise de conscience (p + ) qui permettrait d'en assimiler la représentation. A la prise de conscience succéderait l'introjection (k + ) d'une partie des contenus assimilés par la conscience et enfin, la partie non introjectée serait refoulée (k - ).
Par exemple, si un sujet éprouve un attrait homosexuel, il l'expérimente d'abord sur le mode de la sensation éveillée par un objet, homosexuel en l'occurence, venu du monde extérieur. Ainsi identifie-t-il projectivement - c'est le sens de ce que les kleiniens appellent "identification projective" - son penchant homosexuel, autrement dit, il en fait l'expérience originaire sur le mode projectif (p-). Dans un deuxième temps, si on suit l'opinion de SZONDI, il prend conscience (p+) de son désir homosexuel. Dans un troisième temps, il lui faut prendre position (k: "le moi-qui-prend-position": "Das Stellungnehmende Ich"). Il introjecte (k+) certains traits singuliers ( "Einzige Zuge", l'expression est de FREUD) propres à l'objet homosexuel, et en élimine (k - ) d'autres par la négation (Verneinung), le refoulement (Verdrängung) ou la condamnation (Verteilung).
Lorsqu'il produit ce type de circuit, SZONDI invoque nommément l'évolution plus rationnelle que classique du processus analytique: le sujet actualise ses fantasmes de désir dans la relation transférentielle, ce qui correspond effectivement à un mouvement d' "identification projective" (p - ), ensuite, idéalement, il "identifie" son désir en le conscientisant (p+), enfin il le perlabore, fait la part des choses, en garde une part, l'introjecte ou l'incorpore (k +) et refoule ou, s'il le peut, fait le deuil (k - ) du reste.
Un tel schéma peut bien refléter le mouvement global apparent de la cure analytique mais il se trouve en contradiction avec les données génétiques ou développementales révélées par l'empirie. La tendance à la prise de conscience du désir (p+) n'apparaît jamais que secondairement à la tendance négatrice (k - ). Autrement dit, on dit toujours non avant de dire oui, ou bien le oui n'est vraiment un oui que s'il succède à un non. Ce que les philosophes ont toujours su: "Omnis negatio est affirmatio".
D'un point de vue génétique, si, au moins pour ce qui concerne notre culture, la tendance négatrice-rationnelle (k - ) s'affirme de mieux en mieux tout au long de la période de latence (entre 6 et 10 ans), la prise de conscience du désir (p +: das Wunschesbewusstwerden) ne prend une certaine ampleur que dans la phase tardive de l'adolescencefn 25.
D'autre part, il y a de bonnes raisons de penser que l'ontogenèse du moi se réalise selon le schéma proposé par Susan DERIfn 26:
Sch
1. o - indistinction du moi et de l'autre (avant un an)
2. + - toute-puissance magique-autistique (pré-oedipe)
3. ± - phase de turbulence (âge oedipien)
4. - - période de latence
5. - o début de l'adolescence
6. - + adolescence
Le sujet se découvre d'abord dans son semblable ou son image en miroir, ce qui corespond au mécanisme de l'identification projective (Sch o - ), ensuite il introjecte cette image (k +) pour en faire le noyau de son moi idéal (Sch + - ), instance d'essence corporelle douée de toute-puissance magique.
Ainsi se constitue le narcissisme primaire au sens strict du terme, par l'investissement privilégié de l'objet-moi produit au départ de l'image spéculaire, ce que le mythe de Narcisse illustre assez bien.
Cette imago narcissique primaire qui résulte en fait d'une séduction, créant chez le sujet l'illusion qu'il est le centre du monde et l'objet exclusif du désir de l'autre ou bien, ce qui revient au même, l'objet - le phallus - qui manque à l'autre,
cette imago va nécessairement subir une déflation sous le double impact de la révélation de la différence des générations - "Tu n'es encore nulle part! " - et des sexes: "Il te manque quelque chose ou il y a quelque chose que tout le monde n'a pas et dont tu pourrais être privé".
La réaction k - qui oppose la négation et le refoulement à l'affirmation et à l'introjection (k+ ) assure une fonction de fransformation au sens paradoxal de l'Aufhebung, c'est-à-dire d'une mutation où la suppression de l'ancien état n'implique pas sa destruction pure et simple mais assure au contraire sa conservation sous une espèce nouvelle;l'Aufhebung remplit la double fonction de destituer le narcissisme primaire par l'auto-critique - naissance du surmoi - tout en sauvant ce même narcissisme par la négation des injures faites au premier moi idéal (Sch + - , + o ) et le transfert de la libido narissique primaire sur l'instance secondaire de l'idéal du moi (p + ) que le sujet "projette en avant de lui comme l'héritier du narcissisme perdu de son enfance; en ce temps-là il était pour lui-même son propre idéal. fn 27.
Or, "derrière cette instance de l'idéal du moi se cache la première et la plus importante de toutes les identifications, celle au père de la préhistoire personnelle, identification immédiate, antérieure à tout choix d'objet. . . "fn 28
La prise en compte de cepoint de vue amène à considérer que l'identification "primordiale" au père des origines (Urvater), prototype du Surmoi et du Surhomme (Uberich, Ubermensch) est à situer aussi bien à l'origine (arch) qu'à la fin (teloz) du devenir-soi, comme imago archaïque (Urmensch) et modèle téléologique (Übermensch) du devenir-homme.
Cette remarque est très importante parce qu'elle souligne combien le point de vue génétique est subordonné au point de vue structural qui l'englobe conformément au principe de la réversibilité ontico-ontologique, ce qui veut dire que du point de vue ontologique, dans l'ordre de l'être, la position p+ se situe à l'origine du circuit, tandis que du point de vue ontique, dans l'ordre de l'étant, p + se trouve au stade terminal du développement et du circuit du moi, ce qui donne son sens à la maxime goethéenne: "Deviens ce que tu es !
L'identification finale (secondaire) au père relaie l'identification primaire, originaire.
On comprend par là que dans l'ordre ontique (développemental), du fait de la prématurité et de la néoténie qui caractérise spécifiquement l'être humain, le processus identificatoire débute et s'ancre dans la projection primaire ( p - ) qui consiste à situer l'idéal de toute-puissance du moi dans un autre extérieur concret investi de cette toute-puissance, autre dont le sujet "participe" (p - ) comme FREUD le montre dans "Psychologie collective et analyse du moi"fn 29, l'autre pouvant être incarné, dans les exemples donnés par FREUD, par le chef, l'hypnotiseur, l'objet d'énamoration mais aussi bien la mère .
Si l'introjection (k+) consiste à incorporer en tout ou en partie l'objet d'amour idéal dont le sujet participe (Sch + - ), la négation et le refoulement (k - ) se font au nom d'une instance supérieure, celle du Surmoi-Idéal du Moi (Sch - + ) qui appelle à la désexualisation et au deuil de l'objet originaire, avec, comme corollaire, l'orientation de la libido en direction des objets extérieurs et l'abandon du narcissisme primaire (corporel) au bénéfice du narcissisme secondaire (spirituel).
On obtient donc un circuit du moi en forme de huit renversé:
SCHOTTE propose de généraliser la notion de circuit aux quatre vecteurs pulsionnels:
A l'intérieur de chaque vecteur, un ordre de succession est introduit entre les quatre pôles constitués par les positions positive et négative de chaque facteur.
Les circuits introduisent une asymétrisation entre les deux facteurs de chaque vecteur. Désormais il existe dans chaque vecteur un vecteur - dit directeur (m, h, e, p) - dont la dialectique interne est médiatisée par l'autre. Le passage de la première à la dernière position du circuit se fait par l'intermédiaire du second facteur qui sert de médiateur (d, s, hy, k).
Enfin les circuits introduisent une dimension temporelle, progrédiente, dans la lecture du schéma et des positions, là où SZONDI en avait proposé un ordonnancement exclusivement spatial.
La lecture génétique que nous envisageons désormais est évidemment une exploitation de cette dernière propriété.
Si chaque circuit est le reflet de l'ensemble du schéma, réciproquement, la lecture périodique, qui repose sur l'ordre séquentiel C-S-P-Sch, se trouve complétée ou enrichie, l'ensemble du schéma pouvant désormais aussi être l'objet d'une lecture "en circuit".
Cela signifie que les relations que les vecteurs entretiennent entre eux dans le schéma sont homologues aux relations qu'entretiennent entre elles les positions à l'intérieur d'un vecteur.
L'introduction des circuits fait du schéma pulsionnel une structure à deux niveaux, caractéristique qui se révèle fondamentale pour nos développements actuels, aussi bien d'un point de vue théorique que dans les applications qui en sont faites dans la démarche interprétative au niveau des résultats du test. Le double niveau des circuits permet d'introduire les 16 positions pulsionnelles dans un tableau à double entrée, qui les présente en séries (C: m+ d - d+ m - ) et en niveaux (1: m+ h+ e - p - ) , évoquant quelque chose d'analogue au tableau périodique des éléments conçu par MENDELEEV:
Tentons maintenant de décrire très brièvement les caractéristiques des différents niveaux représentés par les colonnes du tableau, pour lesquels nous supposons qu'ils se trouvent disposés dans un ordre de complexité croissante.
Niveau 1 et vecteur Contact.
Le niveau 1 concerne un sujet essentiellement dépendant, à tous points de vue, tributaire de ce qui se passe dans son environnement, par conséquent susceptible d'être facilement frustré si l'entourage ne répond pas à son attente.
Niveau 2 et vecteur Sexuel.
Les secondes positions des circuits correspondent à un moment de rebroussement auto-érotique dans le fantasmefn 30; c'est un moment spéculaire, imaginaire. En ce sens il marque une première autonomisation par rapport aux positions précédentes.
Si au niveau 1 prévaut l'idée d'environnement ou de milieu, au niveau 2 apparaît la notion d'objet, en particulier le corps perçu comme totalité objectivée, isolée du fond, dans le champ visuel, ce qui souligne la dimension imaginaire de la catégorie de l'objet parce que avec l'objet, il s'agit avant tout de l'investissement d'une image, l'image du corps narcissique.
Niveau 3 et Vecteur P.
Au niveau 3, le sujet s'arrache à l'autocomplaisance de la position 2, sous l'impact de la loi: privation , exclusion et interdiction. Le passage de 2 à 3 met en jeu une opération de négation des investissements d'objets conçus dans la position deuxième où prévaut la dimension fantasmatique. Le processus de contre-investissement, contre-partie obligée du refoulement, donne accès à des objets extérieurs, cette fois réellement autres. La position 3 est définie comme position légaliste-réaliste-rationnelle.
Niveau 4 et vecteur Sch.
Le niveau 4 marque l'entrée en scène du sujet en première personne: sujet en projet, sujet désirant, sujet de sa propre parole.
C'est le temps de l'autonomisation maximale du sujet, autonomisation qui prend une tournure pathologique (psychotique) si elle est corrélative d'une rupture avec l'environnement.
Le niveau 4 est aussi potentiellement le niveau de la sublimation et de la création où le sujet projette d'être libre et responsable de son destin conçu comme histoire à faire.
6. 1. 4. La lecture périodique des circuits pulsionnelsfn 31
L'interprétation tient compte ici de la direction de sens, progressive ou régressive, que prend dans chaque vecteur, le travail sur la pulsion, en accord avec la théorie des circuits pulsionnels, qu'elle exploite selon sa logique propre.
Chaque vecteur connaît ainsi quatre périodes désignées par des chiffres romains, suivant que le facteur le plus chargé en + ou en - , appelé dominant, appartient à tel ou tel niveau - ou période - du circuit.
Tableau périodique des clivages pulsionnels
Par exemple, dans le vecteur du Contact (C), si m+ est une position occupée de manière stable et quantitativement supérieure à d+ ou d-, on pose en principe qu'on se trouve dans la première période du circuit du Contact;si d- domine, on est dans la deuxième période et ainsi de suite, la quatrième période impliquant que la position dominante est m-.
Le facteur dominant peut être qualifié de modulant en ce sens qu'il régule, détermine, module le sens que prend la réaction complémentaire, la réaction d dans l'exemple choisi ici.
Suivant que la réaction en d est nulle (o), négative (-), positive (+) ou ambivalente (±), la réaction m+ restant dominante-modulante, on considère qu'on est dans les temps - ou moments ou stades - premier (C o+), deuxième (C -+), troisième (C ++) ou quatrième (C ±+) de la première période du circuit de la pulsion du Contact.
Nous choisirons pour illustrer le principe qui préside à cette manière d'interpréter l'exemple bien connu que FREUD utilise au chapitre VII de la Traumdeutung pour introduire les notions d'appareil psychique et d'accomplissement de désir (Wunscherfüllung).
Le plus simple est de le citer:
D'abord les grands besoins du corps apparaissent. L'excitation provoquée par le besoin interne cherche une issue dans la motilité que l'on peut appeler "modification interne" ou"expression d'un changement d'humeur". L'enfant qui a faim criera désespérément ou bien s'agitera. Mais la situation demeure la même;car l'excitation provenant d'un besoin intérieur répond à une action continue et non à un heurt momentané. Il ne peut y avoir changement que quand, d'une façon ou d'une autre ( dans le cas de l'enfant, par suite d'une intervention étrangère), l'on acquiert l'expérience de la satisfaction qui met fin à l'excitation interne.
Un élément essentiel de cette expérience, c'est l'apparition d'une certaine perception (l'aliment dans l'exemple choisi ) dont l'image mnésique restera associée avec la trace mémorielle de l'excitation du besoin. Dès que l'excitation se représentera, il y aura, grâce à la relation établie, déclenchement d'une impulsion (Regung) psychique qui investira à nouveau l'image mnésique de cette perception dans la mémoire, et provoquera à nouveau la perception elle-même, c'est-à-dire reconstituera la situation de la première satisfaction. C'est ce mouvement que nous appelons désir ;la réapparition de la perception est l'accomplissement du désir, et l'investissement total de la perception à partir de l'excitation du besoin est le chemin le plus court vers l'accomplissement du désir.
Rien ne nous empêche d'admettre un état primitif de l'appareil psychique où ce chemin est réellement parcouru et où le désir, par conséquent, aboutit en hallucination. Cette première activité psychique tend donc à une identité de perception, c'est-à-dire à la répétition de la perception, laquelle se trouve liée à la satisfaction du besoin.
Une dure expérience vitale doit avoir transformé cette activité psychique primitive en une activité mieux adaptée secondaire. L'identité de perception obtenue par la voie régrédiente rapide, intérieure à l'appareil, n'a pas d'autre part les conséquences qui sont reliées à l'investissement, depuis l'extérieur, de cette même perception. La satisfaction ne se produit pas, le besoin continue. Il n'y a qu'un moyen de rendre cet investissement interne équivalent à la perception extérieure: c'est de le maintenir d'une manière permanente, continue; c'est ce que réalisent les psychoses hallucinatoires et les fantasmes des inanitiés, où l'activité psychique s'épuise à retenir l'objet désiré. Pour obtenir un emploi mieux approprié de la force psychique, il est nécessaire d'arrêter la régression dans sa marche, en sorte qu'elle ne dépasse pas l'image-souvenir, et qu'on puisse à partir de là chercher d'autres voies qui permettent d'établir, de l'extérieur, l'identité souhaitée" (Traduction française, pp. 481-82).
Voilà posée la dichotomie essentielle dans la théorie freudienne entre principe de plaisir et principe de réalité, processus primaire et secondaire, identité de perception et identité de pensée.
Lorsque l'enfant est au sein ou que le sein est à portée, immédiatement disponible, le besoin d'accrochage à la mère peut varier en intensité - de m+ à m+! ! ! - mais la question du manque d'objet ne se pose pas parce que les choses se passent comme si l'enfant ne doutait absolument pas que l'objet, réel en l'occurence, soit à tout instant disponible. Si l'objet vient à manquer, l'enfant manifestera son besoin du sein par de l'agitation, des cris. . . et, comme le note très justement FREUD, ce qui va se modifier, c'est avant tout son humeur. Bien que le terme utilisé par FREUD soit ici, non pas Stimmung mais Gemüt, c'est bien de la manière basale de "se trouver" - bien ou mal -, de la Befindlichkeit, qu'il s'agit, et c'est de cela qu'il est question dans le vecteur du Contact.
C'est seulement dans le temps second de la première période du circuit du contact (C-+) que , "retenant" (d-) du sein réel l'engramme re-présentatif de celui-ci, l'enfant pourra halluciner le sein et obtenir la satisfaction auto-érotique. Autrement dit le passage en (d-) implique l'entrée en jeu du travail de la re-présentation, le rebroussement dans le fantasme qui sous-tend la satisfaction auto-érotique.
Le deuxième temps de la première période du contact (C-+, I 2 ) peut être qualifié suivant les cas d'hallucinatoire, auto-érotique, narcissique ou imaginaire. C'est un temps régulé par le principe de plaisir.
Dans un troisième temps, l'échec de la satisfaction hallucinatoire d'une part, la nécessité imposée par la réalité - le "Not des Lebens" - ou l'autorité d'autre part, vont pousser l'enfant à rechercher dans la réalité (d+) un objet de remplacement - un "Ersatz" - susceptible de lui permettre de retrouver une satisfaction analogue à la satisfaction première.
Tant que le souhait de retrouver cette satisfaction-là domine la vie pulsionnelle, on ne sort pas de la première période, dominée par la tendance m+.
Ainsi, la réaction ( C ++ , I 3 ), est celle d'un sujet qui est perpétuellement en quête d'un objet de la réalité extérieure qui pourrait lui rendre le "bonheur perdu".
Ce troisième temps de la première période du circuit du Contact peut être qualifié tantôt de réaliste, objectal, "nécessiteux" ou illusoire, mais toujours mû par le principe de réalité au sens où l'entend FREUD.
C'est parce que l'objet premier, le sein réel, est à jamais perdu et ne peut être retrouvé ni dans l'hallucination ni à travers ses innombrables Ersätze, qu'un quatrième temps vient à succéder aux trois premiers.
Dans ce quatrième temps ( C±+, I 4), le doute s'installe quant à la possibilité de trouver jamais un objet qui permettrait de retrouver la satisfaction première et plénière. L'objet est perdu pour de bon.
L'ambivalence survenue dans la quête de l'objet (d±) provoque éventuellement la crise ( C ±± > C o± ) qui aboutit à remettre en cause le principe même de l'idéal de satisfaction première et l'objet qui en était porteur, c'est-à-dire, in fine, la mère originaire, l'Urmutter.
Si le sujet poursuit son évolution dans le cycle de la pulsion du Contact, il entre dans la deuxième période, dont le premier temps est caractérisé par le repli narcissique sur le corps propre.
Si, comme nous l'avons fait pour la première période en invoquant le rapport mythique au sein, nous tenons ici pour paradigme l'installation dans la phase anale du développement libidinal,
nous nous représentons le premier temps de la deuxième période ( C -o , II 1) comme le moment où l'enfant fait imaginairement corps avec ses selles vécues comme prolongement narcissique du corps propre, produit précieux entre tous, comme l'avare fait corps avec sa cassette, la mère avec son enfant, le père avec sa famille, l'ouvrier avec son travail, l'artiste avec son oeuvre, l'homme avec sa patrie, sa religion, ses idées etc. . .
Le deuxième temps (C -+ , II 2 ) où d- régule ou module m+, correspond au besoin de renouer le contact avec le monde environnant, la suffisance narcissique qui caractérise la position C -o étant devenue aussi intenable que l'était le C -+ de la première période. On voit bien ici que, selon qu'on se trouve dans la deuxième ou la première période du circuit du contact, la même réaction C -+ reçoit des acceptions différentes voire radicalement opposées. C'est là une des difficultés majeures de l'interprétation du test de Szondi ;on le comprend facilement à partir de cet exemple.
C'est parce que la "demande à l'autre" ou le "désir du désir de l'autre" échoue d'une manière analogue à ce qui s'était produit dans la quête d'un objet de remplacement (C++) que le sujet en vient éventuellement à se dire qu'il ferait mieux de se passer des autres et de se retirer du monde ( C - -, II 3), le doute surgi sur la question du rapport au désir de l'autre (m±), confondu ici avec le rapport au monde -"le monde s'en fout, que j'y sois ou que j'y sois pas"! - ce doute sur la question du rapport au monde, de son importance, de sa valeur ou de sa nécessité, introduit le sujet dans le temps quatrième de la deuxième période (C -± , II 4).
Nous pourrions prolonger ces considérations jusqu'au bout et fournir les exemples les plus illustratifs possibles pour les quatorze périodes suivantes.
Nous espérons avoir été suffisamment claire pour que notre démarche soit comprise lorsque nous utiliserons cette méthode.
Disons encore que conformément à cette théorie, les positions les plus spécifiques sont, selon les périodes, pour chacun des vecteurs:
• C I 1 càd C o+
• S II 2 càd S +-
• P III 3 càd P +-
• Sch IV 4 càd Sch ±+
ce qui pourrait se traduire de la manière suivante: un sujet n'est jamais autant "dans" la position contactuelle qu'en C o+, sexuelle qu'en S +-, éthico-morale qu'en P +- et subjectale qu'en Sch ±+.
Le temps quatrième de chaque période est toujours, comme nous espérons l'avoir fait comprendre, le moment où le sujet fait retour sur lui-même, se pose des questions sur ce qui vient à lui faire problème dans un champ particulier, y réfléchit, bref en vient à se poser comme "sujet de" la pulsion autant que "sujet à" la pulsion, voire "sujet contre" (gegen) la pulsion, ce qui nous induit à retenir pour caractériser ce moment le qualificatif de "subjectal",
e troisième temps pouvant être rétrospectivement qualifié d'"objectal", le deuxième de "narcissique" et le premier de "pré-objectal", d'autres qualifications restant possibles à la condition de s'en tenir à des corps de concepts homogènes ou homologues, telle que , par exemple, la série posée par FREUD dans son étude sur Schreber:
auto-érotisme>narcissisme>homosexualité>hétérosexualité;
ou ailleurs:
principe de constance>principe de plaisir>principe de réalité>au-delà du principe de plaisir;
moi-réalité du début ( Anfangs-Real-Ich ) > moi-plaisir (Lust-Ich ) > moi-réel (Real-Ich) > moi-réalité-définitif (Endgultiges Real-Ich). . .
6. 1. 5. Positions et destins pulsionnels.
La théorie des circuits invite à penser qu'il existe une affinité entre les positions - les réactions - pulsionnelles qui dans chaque vecteur occupent un rang identique.
La question se pose de savoir ce qu'ont en commun les positions:
On peut dire, par exemple, que (e -) est la position contactuelle-thymique du vecteur P, que k - est la position névrotique-adaptative-réaliste-légaliste du vecteur Sch etc. . . mais il faut pouvoir ressaisir ce qui spécifie au mieux ces quatuors.
Jean MÉLON a proposé de les mettre en rapport avec la notion de destinée pulsionnellefn 32 telle que FREUD l'a promue dans "Pulsions et destins des pulsions" (Triebe und Triebschicksale)fn 33 , sans développer ce thème plus avant. On sait bien que FREUD avait le projet, en rédigeant sa "Métapsychologie", de développer une série de thèmes, notamment celui de la projection et de la sublimation, mais finalement il n'a repris que la question du refoulement et de son rapport constitutif à l'inconscient et il a orienté la question du narcissisme vers celle de la mélancolie. Il ne fait aucun doute que dans son article inaugural -"Pulsions et destins des pulsions" - il se promet d'aborder les questions les plus difficiles, celle de la projection, proche du "renversement dans le contraire", celle du narcissisme qui a affaire avec "le retournement contre la personne propre" et celle de la sublimation, mais finalement, fidèle à sa prudence habituelle, il ne traite que de ce qu'il connaît bien, la névrose, le refoulement et l'inconscient, avec une percée du côté de ce qui fait la ruine du narcissisme, la mélancolie.
C'est une des vertus les plus éminentes du système szondien que de permettre l'élaboration conséquente d'une série de concepts que FREUD a seulement esquissés en se limitant à suggérer qu'ils faisaient probablement partie d'une série conceptuelle homogène mais sans être à même de justifier ni de légitimer le sens de pareils regroupements.
Il n'empêche que c'est là que le génie de FREUD se manifeste à l'état pur: ce qu'il rassemble, c'est ce qui d'une certaine manière tient ensemble (zusammenhängt).
Nous avons vu que c'était le cas pour les fantasmes originaires.
On peut tenter de faire la même chose, au moins à titre heuristique, pour les destinées pulsionnelles. Nous poserons donc qu'il existe une affinité certaine entre les positions:
1 C et le "renversement dans le contraire" (Die Verkehrung ins Gegenteil)
2 S et le "retournement contre la personne propre" (Die Wendung gegen die eigene Person)fn 34
3 P et le "refoulement" (Die Verdrängung)
4 Sch et la "sublimation" (Die Sublimierung).
Les positions premières sont celles, comme il a déjà été dit plus haut, où le sujet est le plus dépendant de l'environnement, où le besoin d'un contenant, d'une enveloppe, d'un étayage, d'un support, d'un pare-excitation etc. . . est le besoin majeur. On peut invoquer ici les notions promues par Michaël BALINT d' "amour primaire" (Primary Love)fn 35 et de "défaut fondamental" (Basic Fault) fn 36
, ou encore la "névrose de base" (orale) d'Edmund BERGLERfn 37, pour comprendre ce qui est ici en question: le besoin d'accrochage (m+), d'amour exclusif (h+), la rage (e - ) liée à la frustration, et la projection (p -) comme défense la plus économique mise en acte dans les situations d'extrême détresse (Hilflösigkeit).
La détresse est en effet ce qui menace si l'objet de soutien, que SZONDI a si justement nomé "Haltobjekt", vient à manquerfn 38.
Le "renversement dans le contraire" concerne avant tout les renversements thymiques de l'humeur (euphorie versus dépression, m versus d) mais plus fondamentalement le renversement de l'amour en haine, c'est en tout cas ce que suggère la trame de l'article de FREUD ("Pulsions et destins. . . "), la défense par la haine étant ce qui domine le fonctionnement psychique le plus rudimentaire caractérisé par une faible autonomie et une faible différenciation du moi.
xxx
Les positions deuxièmes correspondent, conformément à notre traduction de "Wendung gegen. . ", au "virage" de la libido "à l'endroit de" la personne propre, c'est-à-dire au "revirement" narcissique tel que FREUD l'a décrit dans "Pour introduire le narcissisme" (1914), virage que LACAN a magnifié dans son "stade du miroir"(1937).
Le sujet adopte une position auto-érotique conservatrice (d -) qui est fortement marquée de rétentionnisme anal, en même temps qu'il s'éprend de son double - son image spéculaire -, produit dans la scène de séduction originaire (s - ); il reste fixé à cette scène, tend à la reproduire en dépit des interdits qui s'y opposent,
se fait valoir envers et contre tout (Geltungsdrang), est compulsivement poussé à se donner en spectacle (hy + : "Sich-zur-Schau-Stellen") en se produisant comme "personnage" (k +) au sens du "Persona" latin qui signifie "masque", le masque en question étant destiné à perpétuer l'image d'un corps glorieux, objet suffisant pour lui-même en même temps qu'objet manquant - "phallus" - pour l'autre.
Les "poses" hiératiques du catatonique, même si elles sont aujourd'hui devenues rares ( alors qu'elles étaient très fréquentes autrefois ), illustrent parfaitement cette compulsion du sujet à se produire comme statue de lui-même (k +).
L'accent mis sur le narcissisme corporel, encore à l'abri de la castration, est ce qu'on retrouve au coeur de la mélancolie, des perversions, surtout masochiste et fétichiste,
des traits caractériels les plus spécifiques en tant qu'ils ont un fondement traumatique-cicatriciel mais aussi, pour une part, dans la sublimation, dans la mesure où celle-ci vise à créer des objets dont la perfection est censée rejoindre la perfection inaltérée de l'imago spéculaire.
Les positions troisièmes vont dans le sens du refoulement à condition d'entendre celui-ci comme l'opération qui consiste à négativer l'imago spéculaire narcissique - imaginaire par définition - et à se détourner en bloc de tout ce qui est imaginaire en investissant préférentiellement la réalité matérielle (d +), en orientant la libido dans le sens de la domination des objets extérieurs au moi (s+), en maîtrisant les affects érotiques par le rejet de toute espèce de sentimentalité jugée ridicule (hy - ) et en privilégiant massivement la perception du réel extérieur qui devient l'étalon de toute réalité (k -) : "Un fait vaut mieux qu'un "Lord-Maire"). Cette position peut être qualifiée indifférement de réaliste, légaliste, rationnelle ou "faitaliste".
C'est la position que nous appelons névrotico-normale, celle qui prévaut absolument dans la période de latence et qui, ultérieurement, moyennant une certaine régression (passage de m - à m+), caractérise la plus grande partie de la population générale. Comme c'est la disposition majoritaire que courtisent les média, il suffit d'ouvrir la télé pour s'en faire une idée.
Les positions quatrièmes sont en rapport avec la sublimation dans le sens où la sublimation implique un certain détachement par rapport à l'ambiance (m -), une désexualisation avec un "transfert de passion" (h - ), un certain besoin de "réparation" comme l'a bien vu Mélanie KLEIN (e +) et la transposition du narcissisme primaire sur l'instance - narcissique secondaire - de l'idéal du moi ( p+).
La sublimation, comme la clinique le montre si souvent, est proche de la psychose, dans la mesure où la désexualisation et le retrait de la libido objectale qu'elle implique, risquent toujours de déboucher sur le vide de la psychose qui peut se définir, sous ce rapport et selon le mot de Michel FOUCAULT, comme "absence d'oeuvre"fn 39
.
Jean Mélon a proposé de calculer les proportions des quatre types de positions pulsionnelles, ce qui permet de se faire une idée de leur répartition quantitative, de "mesurer" leur poids respectif et d'élaborer à partir de là une typologie originale qui prend en compte (houdt rekening met) l'idée de destin pulsionnel.
Selon que l'une ou l'autre des positions pulsionnelles première, deuxième etc. . . est relativement majorée par rapport aux autres, on peut décrire quelques cas de figures simples qui correspondent à des tableaux cliniques facilement identifiables et structuralement organisés de manière bien différenciée:
1. Le tableau idéalement équilibré où toutes les positions se retrouvent en proportions égales:
1 2 3 4
2. Les tableaux gravement déséquilibrés dans les sens:
a)
1 2 3 4
où la dépendance extrême vis-à-vis des objets de l'environnement entraîne facilement des troubles de l'humeur et du comportement (thymo-psychopathies),
b)
1 2 3 4
où la revendication narcissique est exacerbée, déterminant des conduites perverses ou affranchies de tout respect des limites, particulièrement sexuelles, l'intrusion étant la règle;c'est le cas dans la "folie" hystérique;
c)
(1 2 3 4)
où le légalisme, le réalisme et la rationalité sont constamment invoqués, produisant le tableau classique de la "névrose de caractère" obsessionnelle;
d)
1 2 3 4
où le positionnement est typiquement schizoïde, comme on peut le voir, surtout à l'adolescence, dans la "maladie d'idéalité", et chez beaucoup d'anorexiques mentales.
3. Les tableaux névrotico-normaux les plus fréquents, associant les positions:
a)
1 2 3 4
caractéristiques des sujets "adaptés" au sens de la socialisation commune, combinant la soumission aux interdits moraux (hy - ), le respect de la réalité (k - ), l'investissement actif des objets du monde extérieur dans leur concrétude matérielle (d+ s+), la dépendance affective vis-à-vis des objets de soutien (m+), un fort besoin d'être aimé (h+), une intolérance à la frustration avec une propension à la rage (e - ) et la prévalence des idéaux collectifs concrets (p -) sur les idéaux de développement personnel dans le sens spirituel ou éthique du terme;
b)
1 2 3 4
caractéristiques des sujets sublimés chez qui la désexualisation (h - s -) et le retrait hors-monde (d - m - ) sont compensés par le besoin narcissique de créer (k+p+) et l'exaltation passionnée des affects (e+ hy+);
c)
1 2 3 4
conjoncture plus rare des sujets "obsessionnels" chez qui l'isolation entre la pensée et les affects a pour effet de "mentaliser" tous les problèmes, particulièrement ceux du contrôle de la réalité (k±), de la possession de l'objet (s±), de l'investissement des choses en général (d±) et de l'expression des affects (hy±).
Fin Part 1
Footnotes
1. Jacques Schotte. De la Schicksalsanalyse à la Pathoanalyse. Liège, Cahiers du CEP, n°3, 1993, p.4.
"Ce qui est pour nous essentiel, ce qui est la découverte géniale de SZONDI, c'est la constitution du système des pulsions. Ce système des pulsions est à la source, évidemment, de la construction du test; il est lié, dans la pratique qu'il en permet, à ce test. Mais il dépasse cet usage testologique et notamment il est déjà là au fondement, puisqu'il a été l'instrument d'analyse de toute la théorie génotropique elle-même".
2. Jacques Schotte.Notice pour introduire le problème structural de la Shicksalsanalyse. Zurich, Hans Huber, Szondiana 5,1964, pp.114-201. Repris dans Jacques Schotte.Szondi avec Freud. Sur la voie d'une psychiatrie pulsionnelle. Bruxelles, De Boeck-Université, 1990, pp.21-76.
3. Sigmund Freud (1932) .Nouvelles conférences sur la psychanalyse, XXXI, "Les diverses instances de la personnalité psychique", Paris, Gallimard, Idées, 1971, p.80 (GW,XV,64,"Die Zerlegung der psychischen Persönlichkeit").
"Nous savons que la pathologie est capable, en amplifiant les manifestations, en les rendant pour ainsi dire plus grossières, d'attirer notre attention sur les conditions normales qui, sans cela, seraient passées inaperçues. Là où la pathologie nous montre une brèche ou une fêlure, il y a peut-être normalement une articulation (Gliederung ). Jetons par terre un cristal, il se brisera, non pas n'importe comment, mais suivant ses lignes de clivage (Spaltrichtungen ),en morceaux dont la délimitation, quoique invisible, était cependant déterminée auparavant par la structure du cristal. Ces structures fêlées ou fissurées (rissige und gesprungene Strukturen) sont aussi celles des malades mentaux. Vis-à-vis des fous, nous conservons un peu de la crainte respectueuse qu'ils inspiraient aux peuples anciens. Ces malades se sont détournés de la réalité extérieure, et c'est pourquoi justement, ils en savent plus long que nous sur la réalité intérieure et peuvent nous révéler certaines choses qui, sans eux, seraient restées impénétrables".
4. Sigmund Freud (1912). Pour introduire la discussion sur l'onanisme. In Résultats, Idées, Problèmes I. Paris, PUF, 1980, p.180.
5. Jacques Schotte. "Notice...", p.155.
6. Jean Mélon. "Révision de la doctrine szondienne des pulsions". Montpellier, Fortuna, Bulletin du groupe d'études szondiennes de Montpellier, septembre 1987, n° 3, p.5.
7. Le mérite revient à Jacques Schotte d'avoir produit la définition purement étymologique de ce que FREUD nommait de manière équivalente "pulsions du moi' ( Ich triebe ) et "pulsions d'autoconservation" ( Selbsterhaltungstriebe ) quand il les a opposées, dans sa première théorie du dualisme pulsionnel, aux "pulsions sexuelles". Etymologiquement, "( sich ) Selbst- erhalten" signifie": "s'ob-tenir soi-même", ce qui permet , par la médiation d'un seul et même signifiant de réunir ce qui a toujours fait problème dans la théorie psychanalytique du moi, à savoir l'articulation de la question de ses fondements, de son origine sexuelle et de son essence narcissique-imaginaire avec ses fonctions - autoconservatrices - de défense et de contôle des pulsions.
8. Léopold Szondi (1947). Diagnostic expérimental des Le mérite revient à Jacques Schotte d'avoir produit la définition purement étymologique de ce que FREUD nommait de manière équivalente "pulsions du moi' ( Ich triebe ) et "pulsions d'autoconservation" ( Selbsterhaltungstriebe ) quand il les a opposées, dans sa première théorie du dualisme pulsionnel, aux "pulsions sexuelles". Etymologiquement, "( sich ) Selbst- erhalten" signifie": "s'ob-tenir soi-même", ce qui permet , par la médiation d'un seul et même signifiant de réunir ce qui a toujours fait problème dans la théorie psychanalytique du moi, à savoir l'articulation de la question de ses fondements, de son origine sexuelle et de son essence narcissique-imaginaire avec ses fonctions - autoconservatrices - de défense et de contôle des pulsions. Le mérite revient à Jacques Schotte d'avoir produit la définition purement étymologique de ce que FREUD nommait de manière équivalente "pulsions du moi' ( Ich triebe ) et "pulsions d'autoconservation" ( Selbsterhaltungstriebe ) quand il les a opposées, dans sa première théorie du dualisme pulsionnel, aux "pulsions sexuelles". Etymologiquement, "( sich ) Selbst- erhalten" signifie": "s'ob-tenir soi-même", ce qui permet , par la médiation d'un seul et même signifiant de réunir ce qui a toujours fait problème dans la théorie psychanalytique du moi, à savoir l'articulation de la question de ses fondements, de son origine sexuelle et de son essence narcissique-imaginaire avec ses fonctions - autoconservatrices - de défense et de contôle des pulsions.
Léopold Szondi (1947). Diagnostic expérimental des Le mérite revient à Jacques Schotte d'avoir produit la définition purement étymologique de ce que FREUD nommait de manière équivalente "pulsions du moi' ( Ich triebe ) et "pulsions d'autoconservation" ( Selbsterhaltungstriebe ) quand il les a opposées, dans sa première théorie du dualisme pulsionnel, aux "pulsions sexuelles". Etymologiquement, "( sich ) Selbst- erhalten" signifie": "s'ob-tenir soi-même", ce qui permet , par la médiation d'un seul et même signifiant de réunir ce qui a toujours fait problème dans la théorie psychanalytique du moi, à savoir l'articulation
Léopold Szondi (1947). Diagnostic expérimental pulsions. Paris, PUF, 1952, p.1.
"Nous pourrions employer la métaphore suivante: un système pulsionnel doit nous donner une vue synthétique de tout l'ensemble de la vie pulsionnelle comparable à l'impression globale que nous donne la lumière blanche, mais il doit également permettre d'étaler le "spectre " des pulsions tout comme la lumière est décomposable en ses couleurs. C'est là une tâche fort difficile et il n'est point étonnant qu'on n'y soit pas encore parvenu".
9. Jean Mélon.Révision de la doctrine szondienne des pulsions.Montpellier,Fortuna,3,septembre 1987,p.4.
"La théorie szondienne dans sa version originale,soulève toujours le scepticisme sur plusieurs points,en particulier sur la thèse selon laquelle l'hérédité psychique reposerait sur huit paires de gènes allèles.Chacun sait combien cette thèse apparaît invraisemblable en regard des conceptions de la génétique moderne.Accorder crédit malgré tout à la théorie szondienne suppose qu'on la perçoive et qu'on l'aborde sous un jour nouveau et que l'on en recherche la validité par des chemins différents".
10. Sigmund Freud (1915).Pulsions et destins des pulsions.In Métapsychologie.Paris,Gallimard,Idées,1971,p.22.
"Tout compte fait,je doute qu'il soit possible un jour,en se fondant sur l'élaboration du matériel psychologique,de recueillir des indices décisifs pour séparer et classer les pulsions".
En ce qui concerne SZONDI,le paradoxe réside en ceci que,se définissant lui-même comme un empiriste intégral,il a,du moins au niveau de sa démarche créatrice fondamentale,adopté la position moderne de la science au sens kantien du terme,celle d'un idéalisme transcendental qui produit un modèle conforme à la maxime de Goethe:"Le tout est dans la science d'arriver à obtenir un aperçu,c'est-à-dire une aperception de ce qui fonde les phénomènes.Et une pareille aperception reste féconde à l'infini". Cité par Schotte in "Szondi avec Freud",op.cit.,p.20.
11. Jean Mélon.Positions pulsionnelles,fantasmes originaires et système des pulsions.Feuillets Psychiatriques de Liège,1980,13,1,pp.17-26.Une version abrégée de cet article a paru sous le titre "Fantasmes originaires selon Freud et système szondien des pulsions" dans Psychanalyse à l'Université,Paris,1980,5,20,pp.673-680.
12. Sigmund Freud(1917).Extrait de l'histoire d'une névrose infantile (L'Homme aux loups).GW XII,155-156.In Cinq Psychanalyses,traduction de Marie Bonaparte,Paris,PUF,1967,pp.418-419.
13. Jean Mélon.Ibidem.
Mélon soutient à juste titre que le fantasme oedipien n'est pas un fantasme originaire parmi d'autres mais le fantasme englobant des quatre fantasmes originaires qui en figurent les facettes thymopsychopathique (C,régression),perverse (S,séduction),névrotique (P,interdiction-exclusion) et psychotique (castration-néantisation).
14. Jean Laplanche et J.B. Pontalis.Fantasme originaire,fantasmes des origines,origine du fantasme.Les Temps Modernes,215,pp.1833-1868,1964.
15. Sigmund Freud,GW II-III,p.625.Cité par Laplanche et Pontalis,op.cit.,p.1837.
"Faut-il reconnaître aux désirs inconscients une réalité?je ne saurais dire.Naturellement il faut la refuser à toutes les pensées de transition et de liaison.Lorsqu'on se trouve en présence des désirs inconscients ramenés à leur expression la dernière et la plus vraie,on est bien forcé de dire que la réalité psychique est une forme d'existence particulière qui ne saurait être confondue avec la réalité matérielle".
16. Sandor Ferenczi (1932).Confusion de langue entre les adultes et l'enfant.Le langage de la tendresse et de la passion.Sprachverwirrung zwischen den Erwachsenen und dem Kind.Die Sprache der Zärtlichkeit und der Leidenschaft.Oeuvres complètes,IV.Paris,Payot,1982,pp. 125-135.
17. Sigmund Freud.L'Homme aux Loups,op.cit.,pp. 401-403.
18. Jacques Lacan.La famille.Encyclopédie Française,tome 8,40,3-16,1938.
19. Sigmund Freud (1915).Pulsions et destins des pulsions.In Métapsychologie.Paris,Gallimard Idées,1968,pp. 18-20.
20. Jacques Schotte.Notes d'un séminaire inédit,vers 1980.
21. Ibidem,p.25.
22. Ce tableau est repris de Jean Mélon.La position dépressive chez Szondi.Paris,Psychiatries,Revue française des Psychiatres d'exercice privé,43,1,1981,p. 81.
23. Jacques Schotte.Recherches nouvelles sur les fondements de l'Analyse du Destin.Notes de cours 1975-76.Archives Szondi,Louvain-la-Neuve.Pour plus de détails sur la démarche de Schotte,voir Jean Mélon et Philippe Lekeuche,Dialectique des pulsions,3e éd.,Bruxelles,De Boeck Université,1990,pp.20-25.
24. Léopold Szondi.Schicksalsanalytische Therapie.Bern,Hans Huber,1963,pp. 389-391.
25. Jean Mélon.Le point de vue szondien sur la période de latence.Feuillets psychiatriques de Liège,13,140-159,1980.
26. Susan Deri (1949).Introduction au test de Szondi.Traduction de Jean Mélon.Bruxelles,De Boeck Université,1991,pp.182-204.
27. Sigmund Freud (1914).Pour introduire le narcissisme.In La vie sexuelle,Paris,PUF,1970,p. 98.
28. Sigmund Freud (1923).Le moi et le ça.In Essais de Psychanalyse.Paris,Payot,1973,p. 200.
29. igmund Freud (1921).Psychologie collective et analyse du moi.In Essais de Psychanalyse.Paris,Payot,1973,pp. .
30. Jean Mélon et Philippe Lekeuche."Dialectique...",op.cit.,p. 25.
31. Les mérites de la mise au point de cette nouvelle méthode et de son élaboration théorique reviennent à Jean Marc POELLAER.
32. Jean Mélon.Analyse du destin,psychanalyse et psychiatrie.In Recherches théoricocliniques en Analyse du Destin,Cahiers des Archives Szondi,n° 7,Louvain-la-Neuve,Cabay,1984,pp. 85-129.
33. Sigmund Freud(1915).Pulsions et destins des pulsions.In Métapsychologie.Paris,Gallimard,Idées,1968,p. 25.GW,X,p.219.
34. La traduction française de "Wendung gegen..." par "Retournement contre...",qui a reçu la bénédiction de Jean Laplanche et J.B. Pontalis ,n'est pas vraiment correcte dans la mesure ou "Gegen",dans la langue allemande,a deux sens:"contre" et "vis-à-vis de".Quand à "Wendung",on ne peut pas raisonnablement traduire ce mot par retournement,qui évoque un peu trop le retournement du sadisme en masochisme."Wendung" évoque avant tout la notion de "tour"au sens de virage,de détour et de revirement beaucoup plus que de retournement.Donc,"Wendung gegen..." a fondamentalement chez FREUD le sens de se "retourner vers soi-même",où il n'y a primitivement aucune idée d'auto-agression mais beaucoup plus la notion de "tourner" la libido vers soi-même qui constitue l'essence du narcissisme.Ce que FREUD présente comme la deuxième destinée pulsionnelle possible est ,à n'en pas douter,celle du narcissisme,d'autant plus que "Pulsions et destins des pulsions"(1915) est écrit dans la foulée de "Pour introduire le narcissisme" (1914).
35. Michaël balint.Amour primaire et technique psychanalytique.Paris,Payot,1963.
36. Michaël Balint.Le défaut fondamental.Paris,Payot,1967.
37. Edmund Bergler (1949).Basic Neurosis.La névrose de base.Régression orale et masochisme psychique.Paris,Payot,1976.
38. En allemand,"Halt" signifie aussi bien arrêt que soutien,appui,support,soutènement,tenue,cohésion,solidité...Le "Haltobjekt" est cet objet dont on a besoin pour s'arrêter ou se tenir debout,pour ne pas aller à la dérive ou s'écrouler.
39. Michel Foucault.Histoire de la folie à l'âge classique.Paris,10/18,1961,pp.302-304.
"La folie est précisément l'absence d'oeuvre,la présence ressassée de cette absence,son vide central éprouvé et mesuré dans toutes ses dimensions qui ne finissent point....Là où il y a oeuvre,il n'y a pas folie; et pourtant la folie est contemporaine de l'oeuvre puisqu'elle inaugure le temps de sa vérité...."
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